par Marion Messador et Nathanaël Travier • 2 avril 2018
En géologie, la diagnose est une description scientifique d’une roche servant à la construction de systèmes taxonomiques. Confondre donc l’irréductible multitude de l’individuel dans des niveaux de globalités plus accessibles à la pensée humaine.
Si les sciences sociales se sont éloignés, pour éviter de répéter de tragiques erreurs historiques, des classifications sociales systématiques, comment ne pas songer à la géologie pour décrire les identités culturelles ? Ensemble de cristaux hétéroclites, les individus, commes les roches, forment une matrice dont l’unicité frappe au premier abord. La société américaine moderne, plus que toute autre peut-être, justifie cette analogie.
Au niveau microlithique, des strates radicalement diverses, issus d’histoires et de trajectoires sociales radicalement différentes : communautés soudées par une appartenance nationale ou ethnique, groupements sociaux issus d’une histoire culturelle particulière, classes sociales aux déterminismes marqués. Automorphes, ces cristaux offrent des faces quotidiennes sans aspérité : les strates se cotoient, mais ne se mélangent pas, dans des villes où des bouquinistes n’offrant que des éditions en langue originale cotôient les espaces les plus significatifs de l’hyper-consommation populaire.
Au niveau macrostructurel, pourtant, une matrice générale. L’Européen est ici sans cesse confronté à une étrangeté familière, car du premier coup d’oeil on reconnait, sur chaque image, les Etats-Unis. C’est peut-être cela, l’identité culturelle : ce je-ne-sais-quoi qui soude les cristaux dans une indivisible mésostase, la pâte qui forme l’unité du minéral. S’inflitrant partout et colmatant les espaces, imposant ses rigueurs aux cristaux individuels et communautaires, un ciment invisible vient confondre l’hétéroclite dans l’homogène.









